Samedi matin, 9h36… C’est samedi et je suis debout depuis
plus de 3 heures!!!! Coudonc, voyons? Mais qu’est-ce qui me prend donc?? Est-ce
que c’est mon envie de boire du café qui m’a réveillée? Est-ce mon envie de
terminer ma BD? Imaginez donc, je me suis levée avant le soleil… quoi que de
moins en moins difficile je l’avouerai. L’automne fait bien son travail
d’automne ici: journées qui raccourcissent rapidement et pluie et/ou neige sur
une base presque quotidienne! Mauricio, tu devrais définitivement te prendre un
travail de fin de semaine à Umi question d’y amener le soleil injuste qui se
pointe chaque fois que tu es au boulot!
Alors… parlons nord! Hahaha!
Quel étrange début d’année je vous dirai! 27 octobre… déjà…
et… seulement? J’ai l’impression paradoxale que je suis ici depuis bien plus
que deux mois, mais en même temps, j’ai l’impression que le début d’année est
lent… trop lent… Je veux bien croire que le secret du bonheur c’est la lenteur…
mais là, ça s’étire un peu je trouve!
Moi et mon foutu cycle de trois ans! Est-ce que je suis déjà
rendue à ce point? Celui de besoin viscéral de changement? Je pensais que le
nord serait différent… Bon, je pense qu’il est temps que je sorte ma lampe solaire,
car je risque de tomber dans la grisaille là!
…
Voilà! 30 minutes d’éblouissement devant ma lampe à 200$!
Ciel que je me sens mieux (silence tout le monde… je ne veux pas savoir si les
effets bénéfiques de la lampe solaire sont prouvés… dans mon petit univers ça
marche à 400% et il s’agit d’un 200$ bien investi – taïma (terminé en
Inuktitut))
Alors que s’est-il passé depuis le début de l’année?
Bonheur, frustrations,
expéditions, mots et maux
d’enfants…
HONDA (VTT pour ceux qui ne le savent pas) est synonyme de
bonheur à Umi pour moi! Aucune histoire rocambolesque à raconter cependant…
Mais je crois que c’est peut-être mieux ainsi, car même si j’aime bien vivre
dangereusement, je garderai mes cascades pour mes randos à vélo et à pieds (Je
m’assagis sérieusement n’est-ce pas!).
Image bucolique… image photographique que je souhaitais
faire depuis tellement longtemps… Tente sous les aurores boréales… Heureusement
que nous avons profité des derniers weekends du mois d’août pour sortir un peu!
L’insoutenable légèreté de mon Être : lune bleue d’un
côté, coucher de soleil de l’autre, feu, amis et finalement, aurores boréales
sur nos têtes. Quelqu’un aurait dû me filmer… Vikie, une lampe de poche, un
trépied, une tente et une télécommande… Ça n’en prend pas plus pour m’amuser et
me tenir occupée, seule de mon côté pour un bon moment (bon François, je
l’admets… éplucher les tomates peut aussi me tenir occupée seule de mon côté)!
Expéditions Grand Nord!
Le lac Rond, le lac à Billy Tooktoo, les Deux lacs, la
crevasse, le Goulet, excursion autour des îles… Parfois je me dis que ce sera
étrange de revenir au Sud sans ces grands espaces à portée de pieds, de roues,
de ski, de raquettes ou de bateau…
Mais comme je l’ai déjà dit, tout dépend probablement de la manière dont
on regarde les choses autour de soi.
La crevasse avec la famille Caron Larochelle |
Le fameux Lac Rond! |
Et la communauté?
Le village est une fois de plus en
construction-reconstruction. 14 nouvelles maisons seront disponibles bientôt.
Plusieurs autres maisons sont en reconstruction. Comme il y a deux ans, certaines
familles vivent dans des tentes, d’autres dans des shacks (cabanes construites
avec des extra de construction) et quelques-unes sont hébergées dans d’autres
maisons…
John le pêcheur |
Seule dans mon grand 4 et demi… je me sens un peu mal
lorsque je vois la grêle tomber et mon collègue John passer devant chez moi.
John vit avec une Inuk. Leur maison est en reconstruction. Depuis déjà quelque
mois, ils vivent, ou plutôt ils vivaient dans une tente juste au bout de ma
rue. Depuis hier, ils ont été transférés à l’hôtel… La femme de John a été
évacuée par avion avant-hier… Intoxication due au système de chauffage
d’appoint dans la tente… Le combustible était fourni par le
« housing »… Le
« housing » a relocalisé le couple à l’hôtel… John m’a dit que sa
femme va bien… qu’elle a seulement besoin d’être branchée sur un
respirateur…
****Construtcion-Reconstruction = beaucoup de travailleurs
de la construction…
Beaucoup de travailleur de la construction = beaucoup de
jeunes garçons au village…
Jeunes, innocents (dans le sens trop souvent d’innocents) et pleins d’argent, car ne
nous le cachons pas, la construction dans le nord c’est payant. ***
Umiujaq est un village sec. C’est-à-dire que l’alcool y est « interdit ».
En tant qu’enseignante, je dois normalement avoir l’autorisation de la police
pour commander bière, vin et spiritueux. Les Inuit du village quant à eux, ont
accès à 4 permis (pour toute la communauté) d’alcool (pour une quantité limité)
par semaine. Afin de pouvoir « gagner un de ces permis », l’Inuk qui
en fait la demande doit montrer un dossier judiciaire sans restriction face à
l’alcool. De plus, il n’y a pas plus d’un permis attribué par maison (ou
tente ou shack…).
Umiujaq est un village sec… mais pas un village hermétique.
L’alcool est « interdit » au village, mais pas inexistant… Mis à part
les 4 permis émis par semaine, il y a quelques bootleggers (vendeurs d’alcool
illégaux). Une bière 500ml peut valoir 25$. Un 12oz d’alcool fort : 100$.
(Mais qu’est-ce que ça fait si les gens boivent de l’alcool
dans le village me direz-vous? Pourquoi je me mêle de la consommation d’alcool
de mes voisins?
Parce que moi, je les vois, les enfants et les adolescents
qui subissent la consommation de leurs parents et ça me met en colère… Si tes
parents mettent 100$ sur une bouteille de vodka… c’est 100$ de moins pour de la
nourriture (pour toi et tes multiples frères et sœurs…) ou c’est un manteau d’hiver de
moins ou c’est une paire de bottes qui se fait attendre ou c’est une taloche
qui arrive plus rapidement… Et les bouteilles de vodka, c’est aussi plus
d’enfants dans les rues le soir, c’est aussi des ados dehors toute la nuit dans
le parc derrière chez moi, c’est aussi des modèles déficients pour les jeunes,
c’est aussi des femmes qui boivent pendant la grossesse…
(Image un peu triste. Il y a quelque semaine, je suis allée
faire une balade de honda avec mon amie la police. En rentrant dans le village,
je suis passée à côté de la coop. 3 petites filles de 1re et 2e
années sont arrivées en courant au milieu de la rue et m’ont barré le chemin. J’arrête
pour les saluer (pas le choix) et j’entends alors des cris venant de la coop.
Les petites me regardent et se mettent à pleurer et à me dire qu’elles ont
peur… Habituellement, je refuse d’embarquer les enfants (sauf ceux de mes
voisins préférés lorsque nous partons en expédition) sur mon honda… mais là…
j’ai embarqué les trois fillettes et je les ai reconduites jusqu’au bas de la
rue en leur conseillant de rentrer à la maison si elles avaient peur… La
personne qui criait à la coop était juste complètement saoule…
…
C’est seulement après être rentrée chez moi que j’ai réalisé
qu’il s’agissait peut-être bien du père de l’une des petites… Rentre chez toi
si tu as peur que je lui aie dit… ))
Umiujaq est un village sec. 500ml de bière peut coûter 25$ -
12oz de fort peut coûter 100$.
…
***J’ai entendu dire qu’une bande d’innocents de travailleurs de la construction vendait de l’alcool
aux habitants du village… ***
#$%@&!*(
Ça me rappelle cet événement dans l’actualité il y a
quelques années où des gens d’un quartier de Montréal refusaient qu’une maison
d’hébergement pour les Inuit, les Autochtones et les gens des Premières Nations
s’installent dans leur « cours ». Raison : Les Inuit, les
Autochtones et les gens des Premières Nations apportent le chaos, la drogue et
l’alcool…
Je me demande s’il ne serait pas possible l’espace d’un
instant, de voir certaines situations sous un angle différent… Rien n’est tout
noir, rien n’est tout blanc… La vie devrait être perçue comme une vaste palette
de gris… Qui est la raison de quoi? Quoi est la raison de qui? Ne pourrait-on
pas simplement dire que nous sommes tous responsables les uns des autres.
Responsable dans le sens que nos interactions, nos choix, nos manières d’être
avec les autres influencent ceux-ci? Nous avons un impact et une responsabilité
face à notre environnement, face aux gens qui nous entourent. L’idée n’étant
pas de développer une hypersensibilité ou une paranoïa, mais plutôt de se
conscientiser. Ici plus que jamais, je sens, je vois, je sais que mes choix ont
un impact sur les gens. Les mots que
je choisis, les gestes que je pose…
Fin de frustration… Taïma!
Puis surtout parce qu’il ne faut pas mettre tout le monde
dans le même panier (Inuit, travailleurs de la construction, enfants,
adolescents, parents) quelques images en vrac.
Citation : "Tes vêtements et tes cheveux sont très
beaux. " Ça c’est A. qui à sa
manière me souhaite un bon retour à Umiujaq.
Image burlesque… et très embarrassante. Quand on travaille dans une école, nous
avons toutes sortes de responsabilités en dehors de nos périodes
d’enseignement. L’une d’entre elles est de faire l’accueil des élèves le matin
et le midi. Moi j’appelle ça faire la porte! J’aime bien faire la porte et
accueillir les élèves du primaire, mais j’arrive souvent presque en retard pour
cette tâche… Alors, je cours régulièrement dans le corridor (même si tout le
monde sait qu’il est interdit de courir dans une école, surtout qu’avec mes
talents de cascadeuses je risque un jour de me retrouver sur la CSST…) et
j’arrive un peu excité à ladite porte. Comme je suis en retard, j’ouvre souvent
la porte en coup de vent… et le vent s’engouffre souvent rapidement dans la
cage d’escalier… Un de mes apprentissages de cette année : ne jamais plus
porter de robe lorsque je fais la porte!!!!!!!! Vikie en petite robe de
ballerine, avec des collants roses et des bas aux genoux poussant la porte et
recevant un coup de vent en plein sous la robe… L’image de Maryline Monroe sur
la bouche de métro vous dit quelque chose?
À Umiujaq, l’image de l’enseignante Vikie, ouvrant la porte
de l’école jupette au vent restera pour longtemps gravée dans la mémoire de
plusieurs enfants!!!! HHHHHHHHAAAAAAAAA!!!!!!!!!! (Vikie) HAHAHAHAHAHAHAHA!
(les enfants… et Vikie aussi pas le choix!) Qalik Qalak! On a vu les sous-vêtements
de Vikie!!!!
Moment parfait, mais parfaitement éphémère… Carpe Diem.
P., I. et la musique country!
Cette année encore « j’enseigne » la photographie
aux élèves de IPL (Individual Path of Learning). Mon horaire est bien fait,
nous avons deux périodes collées, juste avant la fin de la journée. Un de mes
buts de cette année, sortir les jeunes du village et aller explorer la toundra…
ou la Baie! À date nous avons fait deux sorties.
Par un mercredi après –midi, sortie près de Umiujaluk.
Emprunt du pick-up de l’école. Tous les élèves sont là!!! 7 au total! 5
embarquent dans la boîte, 2 embarquent avec moi. I. et P. ne sont pas très
bavards, j’allume donc le radio. Pour ceux qui connaissent la radio éclectique
de Québec, la radio à Umiujaq est tout aussi surprenante. 20 minutes de silence
rempli par de la musque country et par nos rires, suivi de 30 minutes de grimpe
dans le lichen et les arbustes accompagnés par le rire et les encouragements
des élèves à mon égard et terminés par un retour de 20 minutes à parler avec I.
et P.
Ah oui c’est vrai… Et la photographie dans tout ça? 3 élèves
ont pris des photos, j’ai pris des photos des élèves, 1 élève a servi de modèle
aux autres et 7 élèves ont terminé leur journée d’école avec le sourire.
Le cirque est en ville |
Mais parce que mes travaux
scolaires m’attendent et aussi parce qu’il me semble que je vous avais promis
de faire des chroniques plus courtes, je vais vous laisser sur ces deux images de mon petit bonheur nordique.
8 semaines avant les vacances de Noël… Je ne commencerai pas
à compter tout de suite… mais je ne vous cacherai pas que j’ai quand même hâte
d’aller boire quelques bières au Cheval Blanc… et bien sûre de vous voir!
Vikie