samedi 23 mai 2015

Prendre conscience du mouvement, même s'il est lent!




Retour dans le temps…

Samedi fin d’après-midi… Un hamac, quelques morceaux de melon, une coupe de vin, Eddie Vedder et le soleil plein le visage.
Le temps s’étire en ce premier dimanche de printemps… et ciel que je l’aime le temps lent qui prend son temps à passer, à s’écouler pour mieux me plonger dans cet état de grâce méditatif.
Le temps… trop long celui qui me sépare de mon dernier moment d’écriture.  En relisant les notes que j’ai prises au fil des jours, des semaines et des mois, je réalise que presque qu’une année scolaire s’est déjà ajoutée à mon périple Nordique. En relisant mes notes prises au fil du temps, j’ai aussi le sentiment que bien plus qu’une année s’est écoulée depuis le mois d’août.
La perception du temps… Prendre le temps ou le laisser nous dépasser. Le tuer et le regarder mourir? Le remplir pour mieux s’étourdir?
Moi j’ai tellement de temps que j’ai le temps de me questionner sur le temps… de temps en temps ;-) Vous, est-ce que vous en avez du temps ? En tout cas, si le temps était de l’argent, je peux vous assurer que je serais nantie d’une richesse presque infinie. En fait, je réalise de plus en plus que je me sens effectivement riche de cette richesse impalpable.
Un exemple simple : je prends en moyenne 8 minutes de ma journée pour me rendre à mon boulot (temps total pour 2 aller-retour).  Selon les différentes lecture, que j’ai pris le temps de faire, je constate que je « gagne » environ une heure par jour de liberté comparé à la moyenne des Canadiens. En faisant un peu de gymnastique mathématique, je réalise que je gagne pas moins de 25 heures par mois. 12,5 jours par année… et ce, juste dans les déplacements pour me rendre au travail! On pourrait presque dire que c’est pas loin de deux semaines de vacances supplémentaires dont il s’agit!!!! Hahaha! C’est un peu n’importe quoi, mais en même temps, ça me permet de comprendre comment j’ai fait au cour des dernières années pour développer et entretenir des passions pour la photographie, le tricot, la guitare, le ukulélé…  Je suis maintenant plus riche des ces nouvelles passions.


Alors, il y a bien la quantité de temps dont on dispose, mais il y a aussi la vitesse du temps qui s’écoule. Parce qu’on doit bien se le dire, le temps s’écoule, passe et ne revient jamais. Je n’aurai jamais plus 20 ou 30 ans… et la plupart d’entre vous non plus ;-) Est-ce que votre temps passe vite ou lentement? Vous vous rappelez M. Ibrahim? « Le secret du bonheur c’est la lenteur » qu’il disait.
Donc, malgré mes deux semaines de congés de plus par année, il m’arrive encore de trouver que je manque de temps pour profiter pleinement de mes journées! Il va trop vite mon temps finalement! Et là je me dis que… dans ce désert blanc, il doit souvent m’arriver de tomber en transe, il doit m’arriver fréquemment de me perdre entre deux moments… Tout va si lentement autour de moi… Comment puis-je donc manquer de temps?
J’ai plus de temps. Je fais tout plus lentement. J’apprécie chacun des moments.
Mais j’en voudrais encore plus de ce temps, pour le remplir de nouvelles passions pas encore imaginées. Je voudrais aussi qu’il aille plus lentement ce même temps, pour que l’âge me rattrape moins rapidement ;-) Vous, est-ce que vous l’avez ce sentiment que vous n’aurez pas assez de temps pour vivre toutes les découvertes qui vous sont offertes?


« Life is too short. Life is too short. Life is way too freakin short »
Paroles d’une chanson de Jaaji Opik – artiste Inuit







Pendant ce temps, dans le moment présent…


Le temps qui passe, qui s’écoule et qui ne revient pas… La fatalité du temps en quelque sorte… Parce que parfois ils sont bien là les moments dramatiques. Il y a 3 mois, M nous a quitté. La semaine dernière, c’est J qui est parti. Cette année, deux de mes anciens élèves sont restés pris dans la fatalité du moment. Chaque fois, ils m’ont emprisonnés dans une dramatique réalité. Deux pertes de trop. Deux jeunes qui ont sans doute crus que le temps s’était arrêté sur leur triste réalité.  Deux jeunes qui n’ont su voir la progression lente de leur moment. Deux élèves qui ont cessés de croire l’espace d’un instant et qui ont perdus l’essence même de leur vie. Pris dans un moment dramatique, sûrement rempli d’un désespoir et d’une douleur infinis. Seuls. Peut-être que leur temps allait encore plus lentement que le mien finalement. Peut-être qu’ils n’ont pas vu le mouvement. Peut-être qu’ils n’ont pas eu la force d’étirer le regard pour voir la vie qui était là et qui continuait. Peut-être sont-ils restés pris dans le moment, comme dans une sorte d’inertie.
Et si le secret de la douleur c’était l’extrême lenteur ? En tout cas, le secret de ma douleur c’est l’extrême fatalité du geste que ces deux jeunes de ma communauté ont posé.  Je me rappelle avoir dit quelque fois à des amis : il n’y a rien de définitivement dramatique dans la vie car rien n’est jamais statique, tout est toujours en mouvement, même les mauvais moments… Il n’y a rien de définitivement dramatique dans la vie…  sauf la mort que je leur ai dit. Tant qu’on est vivant, il y a de l’espoir… 

Aujourd’hui, je réalise un peu plus que là où il y a  de l’espoir, il peut également y avoir un puit sans fond de désespoir…

« Life is too short. Life is too short. Life is way too fucking short »

Ils me manquent ces deux jeunes avec qui j’ai passés de si bons moments. Je suis certaines que la douleur que je ressens à leur simple pensée n’est rien à côté de ce qui les a amené à s’enlever la vie. Je garderai d’eux les bons souvenirs que nous avons partagés lors de nos sorties dans la toundra, caméras à la main. Je garderai en mémoire les paroles que nous avons échangées, sur la route du Richmond Gulf, la musique que nous avons partagés, les rêves que nous avons rêvés ensemble, les rires sincères qui nous ont animés au cours de ces 5 années.

Je vais aussi écouter leur dernière parole et essayer de la comprendre, de l’accepter et de la transformer… Ce geste extrême et violent qu’ils ont posés veut bien dire quelque chose n’est-ce pas?