Réflexion…
Quelqu’un
a déjà dit : « Si tu fais le mal, fais-le bien. » Je l’ai
moi-même souvent dit et parfois même appliqué avec beaucoup de rigueur…
Le
bien et le mal… L’acceptable et l’inacceptable… Concepts aux frontières parfois
un peu floues… Que pense l’enfant soldat du bien, installé à la frontière de
son pays, arme à la main? Qu’est-ce qui est acceptable pour lui?
Le
bien et le mal… Au fond, peu importe si nos actions se situent dans l’une ou
l’autre des catégories, les conséquences de celles-ci seront les mêmes je
crois. Quand je pose une action, je pense généralement que je fais le bien.
Mais est-ce que je fais vraiment généralement le bien? Qu’en pensent les gens
qui m’entourent? Question de point de vue? Question de culture? Question d’expériences?
Point
de presse…
Dimanche
3 mars. Jacques Brel, café et internet. Mes amis Karl et Nicholas viennent
déjeuner aujourd’hui. C’est un peu devenu une habitude de fin de semaine pour
le trio infernal que nous sommes. Nos déjeuners durent généralement 3 ou 4
heures. Ce n’est pas comme si nous avions des tonnes de nouvelles à nous
raconter depuis la veille, mais nous avons trouvé une sorte de zone de confort
dans laquelle nous pouvons réinventer la vie, le monde, le Nunavik… Dimanche 3
mars. Jacques Brel, café et internet. Comme nous ne fixons jamais d’heure, je
me mets en ligne sur facebook pour voir si l’un ou l’autre de mes policiers
préférés est déjà levé. Karl est là… Nich est là… Sur leur photo de profil, je
vois une boucle noire avec le logo du KRPF (Kativik Regional Police Force). Un
policier de Kuujjuaq a perdu la vie hier soir et un autre est blessé. Appel
pour violence conjugale… Ces deux policiers n’ont pas eu la même chance que mon
amie Megan…
-Extrait
de la publication du mois de janvier-
« Dans
l’irrationalité des raisonnements qui arrivent parfois, je me suis surprise à
ressentir un sentiment de soulagement en me disant qu’heureusement… elle
[Megan] n’avait reçu que quelques coups de poing (bordel quel poing!). Mais quel genre de réflexion te fais-tu
Vikie??? Et bien ici, dans plusieurs
maisons, il y a des harpons et des carabines… Quelques coups de poing, en y
pensant bien… Ça peut presque ressembler à un soulagement finalement… »
Je
ne connais pas ces deux policiers de Kuujjuaq… Mais je sais qu’un des deux est
décédé, que sa famille et ses amis ne pourront jamais plus profiter de sa
présence… Je sais que l ‘autre restera marqué par cette intervention qui
aura coûté la vie à son partenaire…
Coûter
la vie…
Mais
elle a quel prix au fait la vie? Pour vous? Pour moi? Pour le KRPF? Pour le
système de justice? Est-ce que c’est juste, justement de mourir en faisant son
travail? Même si notre travail c’est d’être policier? Est-ce que mourir devrait
être un risque du métier?
Je
ne connais pas ces deux policiers de Kuujjuaq… mais je connais les trois
policiers d’Umiujaq… Je vous offre
humblement tout mon soutien, toutes mes condoléances et toute ma gratitude.
Merci d’être ici, d’avoir croisé ma vie, de m’avoir permis de faire tomber
quelques-uns de mes préjugés.
Aujourd’hui
cependant, j’ai comme une sorte de souhait inavoué, soit celui de vous voir
tous partir d’ici, pour un ailleurs peut-être pas meilleur, mais pour un
ailleurs où le ratio arme à feu / habitant est un peu moins élevé… Je vous veux comme amis longtemps. Mais
en même temps, je veux aussi que vous continuiez à être policiers, car du haut
de mon ignorance, je sens que vous faites le bien, bien…
Ce
soir mes pensées se perdent dans l’irréalité… Et j’imagine le pire... Je me demande
si ça fait vraiment du sens… Un appel arrive sur la radio… Deux policiers y
répondent… Appel de détresse… parce qu’on se le rappelle bordel… les policiers
n’interviennent pas comme ça chez les gens… Un appel arrive sur la radio… Deux
policiers y répondent… S.D. perd la vie…
Et
si vous partez demain amis policiers, même si je vous regarde partir avec le
soulagement dans l’âme et le bonheur dans le cœur, dites-moi comment je
regarderai vos remplaçants arriver?
…
Dans un tout autre ordre d’idée et parce
que le Nunavik c’est encore et toujours de belles images en vrac…
27
février à Umiujaq…
Le
27 février est une journée bien spéciale pour un résident du village. Et, bien au-delà
de la journée qui est spéciale, le résident lui-même doit bien avoir un petit
je ne sais quoi, car pas moins de 15 personnes se sont déplacées pour aller le
visiter.
Le
27 février est donc un soir de fête à Umi. Oui oui! Richard Parker, mon mari,
fête son anniversaire aujourd’hui! Jeune homme fringant, doux, roux, grand,
musclé, indépendant, avec juste assez de mordant. Le mari parfait je vous le
dis!
Oups,
mais c’est vrai… Vous ne saviez peut-être pas que l’an dernier je m’étais
marié??%$#%???? Mais oui, vous savez… Juste avant mes vacances à La Havane…
Rappelez-vous : Richard Parker, mon mari, jeune, musclé, fort et amateur
de golf! Visitant les terrains pendant que moi je me baladais dans les rues de
la capitale! Est-ce que j’avais oublié de vous partager cet épisode de ma
vie???
- « Vikie
Brabant, acceptez-vous de prendre Richard Parker pour époux? »
- « Oui je
le veux.»
- « Richard
Parker, acceptez-vous de prendre Vikie Brabant pour épouse? »
- …
- « Richard
Parker… M. Parker??? »
- … « Miaou
je le veux! »
Bon
d’accord, j’explique un peu! Avant de partir seule en vacances l’an dernier,
Angela, la mère de Richard Parker (ben pas la mère biologique là, la mère
adoptive) m’a suggéré de porter une bague de mariage pour mon séjour à La
Havane. En plus de la bague, elle m’a suggéré de me préparer à répondre aux
questions personnelles du genre : êtes-vous marié, comment s’appelle votre
mari, qu’est-ce qu’il fait dans la vie? Angela et moi avons donc passé la
soirée à élaborer un scénario de vie fictive pour moi, dans lequel nous m’avons
marié à Richard Parker, le chat de la maison!
Mais
le plus drôle dans tout ça, c’est que par un mercredi soir, 15 personnes
d’Umiujaq se soient réunies pour fêter la fête d’un chat. Cadeaux, gâteau et
jeux! Sans doute avions-nous simplement besoin de cette porte de sortie
irrationnelle.
Jeudi
dernier…
18h45, Angela m'appelle
pour me dire que les aurores sont dehors. Étonnée et vaguement incrédule, je dois l’avouer (le soleil n'est même pas encore tout à fait couché), je
m'habille en vitesse avec un doute en tête. Peut-être que mes amis nordiques
ont fait un pari et se demandent jusqu'à quel point mon envie de la photo
ultime repoussera les limites de ma naïveté... Tout en m'habillant (comme dans
mettre des vêtements de neige et non comme dans je suis toute nue chez moi à
18h45, quoi que dans le fond ça ne vous regarde pas...), j'accroche le
téléphone et passe le message à Karl. Avec la même incrédulité que moi, il me partage
toute sa réflexion (que j'écoute à peine question de continuer dans les
confidences… pardon Karl) et je finis par lui dire : « Tu fais ce que tu
veux, mais moi je sors et je serai sur la plage enneigée à quelques pas de chez
moi! »
Une nouvelle première nordique pour moi !!!
Aurores sur coucher de soleil ! Je suis vraiment excitée quand je réalise
qu’il n’y a aucun coup monté ! À peine le pied dehors, j’aperçois les
aurores dans le ciel. Les jambes à mon cou et le trépied sous le bras, je
cours, je cours, je cours ! WOUAWE !
Karl arrive pas longtemps après moi. Dans
l’énervement du coup de téléphone, je réalise que je n’avais pas pris le temps
d’écouter sa réponse finale et de dire au revoir… Il s’installe à côté de moi,
nous échangeons quelques informations : vitesse, ouverture, iso… Angela
nous rejoint et quelques photos plus tard, nous voilà dans le pick-up policier,
en route vers le dépotoir.
Heureusement que le ciel nous offre un spectacle
impressionnant… Karl arrête notre trajet juste après le premier tournant. Pas
le choix d’arrêter si on ne veut pas manquer le meilleur… En débarquant, je
remarque que nous sommes exactement au même endroit que lors de ma dernière
expédition aux aurores en solitaire avec mon Honda « défectueux »
(que j’avais poussé pour revenir vous vous rappelez ?). Coup d’œil
circulaire. Karl d’un côté de la route, moi de l’autre. Angela couchée au milieu.
On n’en revient juste pas ! Regarde là ! Puis là ! As-tu vu
ça ?
Entre deux déclenchements d’appareils photo et
quelques exclamations redondantes, le son de la radio de Karl s’occupe de nous
ramener à la réalité ! Une voix paniquée se fait entendre, Karl plie
trépied, nous dit de monter. Court silence. Angela et moi on se regarde. Nous
allons rentrer à pied.
Nous avons fait quelques photos de plus, dans un demi-silence,
avec un peu de retenue dans notre extase auroresque. J’ai reconnu la voix à la
radio. Angela et moi n’osons pas trop commenter. On se concentre finalement sur
le ciel vert et presque violet.
...
...
Je réalise que je suis un peu comme une enfant
gâtée de la Vie! Jeudi, quand je suis sortie faire des photos des aurores
boréales avec Angela, elle et moi avons trouvé le moyen de nous plaindre du
fait que notre ciel manquait d'aurores cette année! Nous avons même poussé
l'audace jusqu'à affirmer que ça faisait du bien d'être enfin sous un ciel
lumineux dansant!
La perspective… Toujours faire preuve de
perspective !
Il
y a quelques semaines…
Première
visite perso à Umi pour moi! Quoi que je dis perso, mais en même temps je
pourrais peut-être dire visite circonstancielle! Frédéric (ami tout droit sorti
du secondaire et retrouvé via Facebook) et Étienne (fils le plus âgé de
Frédéric) débarquent dans mon petit paradis pour 3 jours! QUOI???? POUR TROIS
JOURS SEULEMENT????? Il est riche où quoi ton ami Fred?
MeeeeeeeeeeeNNNNONNNNNNNNNNNN!
Fred
travaille à PET. Une semaine de congé pour lui, une invitation de ma part et un
bon deal sur des billets d’avion à cause de son emploi. Plusieurs
d’entre vous connaissent ma facilité à vous suggérer régulièrement de venir me
visiter. Je n’arrête pas de lancer des invitations à gauche et à droite depuis
près de trois ans maintenant! Eh bien, je le savais que ça allait marcher un jour!
Et
puis pourquoi pas un Igloo?
Parce
qu’après avoir construit un Inuksuk géant en neige (qui n’a pas tenu le coup),
la suite logique nous amenait tout droit vers l’igloo (et aussi parce qu’on
s’ennuyait peut-être beaucoup de Nich). Le périple architectural commence donc
par un message de Karl (ben oui encore Karl).
- Vikie, si on
construisait un Igloo demain?
- Heuuu… C’est
que j’ai des travaux à faire moi!
- Mais Vikie, on
pourrait commencer dans l’après-midi.
- HHHHeuuuuuu…
Ok, mais je devrai faire des travaux dimanche matin aussi si je vais jouer
dehors samedi après-midi… ce qui veux dire qu’on ne déjeunera pas ensemble ce
weekend…
- Vikie, voilà ce
que je te propose : on fait l’igloo samedi et dimanche après-midi, tu fais
tes travaux les matins et dimanche soir tu viens souper chez moi et tu
continues tes travaux pendant que je fais à manger!
- Heuuuu…. DAC!
Mais ça se construit comment un igloo Karl?
- Pas de blème,
je t’envoie la marche à suivre que j’ai trouvée sur le net!
C’est donc armés de pelles, de scies et de la marche à suivre trouvée sur internet que nous commençons notre construction! Je vous épargne les détails, car il se fait tard mes chanceux… Mais disons qu’en plus d’apprendre à construire un Igloo, j’ai appris :
1. qu’il est
préférable de toujours valider les instructions visuelles par une lecture du
texte en petit caractère qui les accompagne…
2. que même si un
trou n’est pas très gros… il peut être très profond et qu'on peut tomber longtemps
dedans…
En images…
Ski
et sauts sur la Baie et aux îles en solitaire, mais avec la musique d’Éric dans
les oreilles!
Je
terminerai avec une pensée spéciale pour mes voisins préférés… et pourquoi pas pour chacun de vous après tout...
Prenez soin les uns des autres. Je vous
envoie plein de câlins parce que les câlins ça fait du bien!
Plus de photos : http://vikieaununavikeetailleurs.shutterfly.com/pictures